Des « emplois 3D : dégueulasses, dangereux et dévalorisés », ainsi Katsuya Tomita qualifie-il les postes précaires qu’occupent les ouvriers de Saudade.
Le cinéaste en sait quelque chose : chauffeur routier pendant ses deux premiers films,
il était ouvrier du bâtiment pendant celui-ci, en partie tourné sur son lieu de travail. A travers
l’histoire de plusieurs ouvriers envoyés par des agences sur un site « pourri », cette fiction d’une liberté de ton électrisante sonde une identité nationale en miettes.
Takeru, dont les parents se sont ruinés au jeu de pachinko, chante sa rébellion dans un groupe de hip-hop qui partage bientôt les scènes locales avec les nippo-brésiliens danseurs de capoeira. Seiji, qui n’a connu que les chantiers, se sent enfin « chez lui » lorsqu’il rencontre une Thaïlandaise ; Hosaka revient de plusieurs années en Thaïlande...
Les relations sont tendues entre Japonais et immigrés, ce que montre avec précision chacun de leurs parcours. Le nationalisme de certains jeunes, la toxicomanie d’autres sont des contrecoups du désastre social. « Saudade, écrit dans Libération Philippe Azoury, est un chantier identitaire où ceux qui creusent leur propre tombe rencontrent ceux qui s’enfoncent à la recherche de leurs propres fondations ».